La gestion durable des déchets était au cœur des interventions de la dernière table ronde de la Semaine de l’environnement, organisée par la Somapresse en marge des Trophées de l’environnement. Recycler les déchets inertes, rendre la ville plus propre, le tri sélectif et réduire la production de déchets sont autant de sujets qui ont été abordés.
Pour la dernière table ronde organisée dans le cadre de la Semaine de l’environnement, la Somapresse (société éditrice de Flash Infos et Mayotte Hebdo) a voulu s’intéresser à la question de la gestion durable des déchets. La pollution qui découle de ces derniers est une de celles qui pèsent le plus sur Mayotte. C’est pour cela que les quatre invités présents ce mercredi après-midi dans les locaux de notre journal, à Cavani, ont décidé de s’investir dans la lutte contre ce fléau. Frédéric Polenne, directeur général de l’entreprise ETPC (Entreprise de Travaux Publics et de Concassage), a présenté la pratique récente mise en place par son entreprise, à savoir la récupération des déchets de type gravats, cailloux ou encore morceaux de béton, issus des chantiers. Dans le cadre de la responsabilité élargie du producteur, la société a ouvert plusieurs points de collecte pour qu’artisans et entreprises viennent déposer leurs déchets inertes. “À partir de 2025, cela sera gratuit”, précise-t-il.
Au lieu que ces déchets soient enfouis, l’entreprise s’occupe ensuite de les recycler, pour former un nouveau matériau qui peut ensuite servir dans de nouvelles constructions. “Cela nous permet de proposer un matériau avec les mêmes caractéristiques en évitant de devoir exploiter davantage de carrières”, indique-t-il. Un gain non négligeable en matière de préservation de l’environnement, dans un contexte d’autant plus difficile d’accès au foncier. Si les particuliers doivent se contenter d’apporter ce type de déchets à la déchetterie de Malamani, à Chirongui, ETPC noue d’ores et déjà des partenariats avec des collectivités. C’est d’ailleurs le cas avec le Syndicat intercommunal d’élimination et de valorisation des déchets de Mayotte (Sidevam), pour justement s’occuper des déchets inertes apportés à la déchetterie. Le type de collaboration qui intéresse grandement Yssad Mohamed Youssouf, directeur de la propreté urbaine à la Ville de Mamoudzou : “On voit souvent des sacs de riz remplis de ce type de déchets dans les rues, et on ne savait pas quoi en faire jusqu’à maintenant”.
Encourager le tri en amont
Ce dernier a poursuivi en présentant les différents enjeux de la propreté urbaine à Mayotte, puis plus particulièrement sur Mamoudzou, qui a fait de ce sujet sa grande cause communale. Loin de se résumer à la collecte des déchets, œuvrer pour cette cause implique également le lavage, le balayage, la dératisation des rues et espaces publics. Mais le défi majeur des municipalités reste la collecte des déchets dans les quartiers informels. “Il y a de plus en plus d’habitants, donc de plus en plus de déchets. Seulement il n’y a pas nécessairement beaucoup plus de contributeurs”, explique-t-il soulignant que les moyens pour nettoyer les rues n’augmentent donc pas autant que la population. Si la Ville organise de nombreuses opérations de collecte comme avec Novembre vert ou encore des opérations coup de poing d’enlèvement de véhicules hors d’usage (VHU), son directeur à la propreté insiste sur l’importance d’agir en amont, avant que les déchets ne se retrouvent dans la nature. “La sensibilisation est primordiale. On a aussi installé récemment de nouvelles corbeilles publiques”, décrit-il.
Afin d’inciter la population à disposer leurs déchets au bon endroit, le Sidevam travaille actuellement sur le projet Douka, qui consiste à expérimenter un système de consigne dans un réseau de commerces en échange de bons d’achat. “On espère que cela peut contribuer à réduire la quantité de déchets plastiques dans les quartiers informels”, avance Douambati Miniadji, chargée du programme local de prévention sur les déchets ménagers pour le syndicat. Un travail nécessaire, alors qu’encore trop de déchets emballages finissent dans le centre d’enfouissement de Dzoumogné. En effet, il existe une autre solution de traitement pour 54% des déchets enfouis dans l’installation de stockage de déchets non dangereux (ISDND). “Cela réduit la durée de vie du centre”, alerte-t-elle. Pour encourager le geste de tri, le Sidevam a inauguré récemment la première déchetterie de Mayotte à Malamani. La première d’une série de huit qui doivent voir le jour sur l’île. Déchets verts, inertes, recyclables, textiles… le nouveau dispositif propose une solution pour une grande variété de déchets et espère venir à bout des décharges sauvages.
Réduire les déchets à la source
De son côté, afin de réduire le nombre de déchets en amont, Isaac Tamime a cofondé Ecol’eau, une entreprise proposant différentes solutions de filtrage, comme des filtres sous-évier, à gravité, ou encore des gourdes filtrantes. “Il y a une vraie méfiance de la population vis-à-vis de l’eau du robinet”, observe-t-il. Il a ainsi décidé de commercialiser à Mayotte les filtres Doulton. “Une cartouche permet de filtrer 2.300 litres d’eau”, illustre-t-il, ajoutant que cette solution est également économique. En effet, si un litre d’eau en bouteille coûte 1,3 euro, il revient à dix centimes en optant pour un filtre. Pour le fondateur, la crise de l’eau a montré que la consommation de bouteilles n’était pas viable pour la nature. “À cette période, on n’a jamais observé autant de déchets plastiques sur les plages”, réagit Michel Charpentier, président de l’association Les Naturalistes, présent pour écouter les interventions.
Existant depuis six mois, l’entreprise a déjà été primée lauréate au concours Innov’action, un vrai coup de pouce pour elle. L’ensemble des intervenants ont salué cette alternative au plastique, prometteuse pour réduire le nombre de bouteilles dans la nature.
Marine Gachet