25.000 tonnes de terre dans le lagon chaque année à cause de l’érosion

25.000 tonnes de terre dans le lagon chaque année à cause de l’érosion

Alors que l’archipel de Mayotte est exposé à la plupart des risques naturels existants, à l’occasion de la Semaine de l’environnement, la Somapresse (qui édite Flash Infos et Mayotte Hebdo) a organisé une matinée dédiée aux aléas naturels avec des experts de ces sujets. La thématique de l’érosion a été abordée.

Qui dit saison des pluies, dit érosion, l’un des risques naturels majeurs auquel l’île est confrontée. La déforestation en est l’une des premières causes. « Lorsque les arbres sont coupés, la pluie violente attaque directement les sols. La canopée n’est plus présente pour amortir sa force », souligne Michel Charpentier, le président de l’association Les Naturalistes. En cette saison, les sols sont encore plus vulnérables car souvent nus, un moment où les agriculteurs en profitent pour planter manioc et bananiers. Ces cultures, par ailleurs, très présentes à Mayotte ne retiennent pas l’eau. « Les bananiers ne sont pas des arbres, de fait, la pluie s’infiltre très facilement dans le sol. Dans un champ en pente, elle descend très rapidement jusqu’à une ravine, puis jusqu’au lagon. »Chaque année, environ 25.000 tonnes sont déversées dans le joyau de Mayotte. « Cela handicape les récifs coralliens qui se retrouvent envasés », décrit le représentant des Naturalistes, lors de la première table-ronde de cette Semaine de l’environnement, ce lundi matin. La couleur brune-orangée qu’on peut observer sur les côtes après les pluies correspond aux sédiments qui se sont écoulés. Problème : dans le lagon, les courants ne sont pas assez puissants pour balayer la boue.

Éviter les travaux à la saison des pluies

Au-delà de la déforestation, les chantiers de terrassement sont également responsables de l’érosion. Lorsque les particuliers entreprennent des travaux, « il ne faut pas laisser la terre exposée à la pluie, mettre tout simplement une bâche par-dessus le tas règle déjà une partie du problème », explique Floriane Ben Hassen, responsable de l’antenne mahoraise de Météo France. Elle recommande également de ne « pas les faire à la saison des pluies car actuellement elles arrivent dans le lagon ou dans les rivières ».Pour éviter l’érosion, plusieurs pratiques sont conseillées, sur la manière de faire des plantations par exemple, « en cassant les pentes pour faire en sorte que la terre ne s’en aille pas », illustre la responsable de Météo France. « Finalement, c’est plus bénéfique en termes de rendement agricole. Quand on a fait du brûlis, nous avons l’impression que c’est plus intéressant mais c’est faux. La première année, on a des apports de phosphate et nitrates intéressants, mais la deuxième année, le sol est extrêmement pauvre car quand on brûle le terrain, toute la vie qui s’y trouve est tuée ».

Avec le paillage, le rendement est plus important. En contrepartie, « cela nécessite beaucoup plus de travail », convient Floriane Ben Hassen. Tandis que c’est très fastidieux car cela nécessite de réduire les végétaux en petits morceaux pour les étaler sur le terrain, selon la spécialiste, « il faudrait développer une filière pour le paillage à Mayotte ».

Des conseils pratiques accessibles

Pour adopter des pratiques qui préservent les sols, le projet Leselam (lutte contre l’érosion des sols et l’envasement du lagon à Mayotte) a été lancé sur l’archipel. Il a permis de publier des flyers de conseils pratiques au grand public, un est dédié à l’agriculture, un autre sur la construction de maisons et un autre sur les ravines et jardins. Il est à télécharger en ligne mais il est aussi possible d’aller les chercher au bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) situé aux Hauts-Vallons derrière les locaux de Mayotte la 1ère ou au siège des Naturalistes à Dembéni.

Lisa Morisseau

Cette matinée dédiée aux risques naturels a été filmée et enregistrée à la radio. Les contenus sont à retrouver bientôt sur nos différents supports (radio, chaîne YouTube, réseaux sociaux, etc).

Le volcan sous-marin à la loupe

Si le volcan sous-marin Fani Maoré, à cinquante kilomètres de Petite-Terre, a marqué la population par les tremblements de terre qu’il a engendrés en 2018 et 2019, il marque l’Histoire de la volcanologie depuis son apparition. Il s’agit en effet de la première naissance d’un volcan qui peut être observée par l’humain avec les technologies modernes. Depuis son apparition, le Révosima (Réseau de surveillance volcanologique et sismologique de Mayotte), qui est piloté par l’IPGP (Institut de physique du globe de Paris) et le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières), étudie étroitement son activité sismique et ses conséquences, aussi bien depuis des stations en mer que sur terre. Hydrophones pour écouter les bulles provoquées par le volcan situé à 3.500 mètres de profondeur, sondes magnéto-telluriques pour étudier le niveau de la lave en sous-sol, dragage de roches au fond de l’eau pour analyser les sédiments… De nombreux outils ont été déployés pour surveiller son activité lors de la trentaine de campagnes Mayobs qui ont eu lieu jusqu’alors. Ainsi, Ludivine Sadeski, directrice régionale du BRGM Mayotte, affirme que le volcan n’est plus en éruption à l’heure actuelle. Néanmoins, l’activité de la chambre magmatique entraîne des séismes chaque jour, mais d’une magnitude trop faible pour qu’on le ressente. L’enfoncement de l’île provoquée par l’apparition du Fani Maoré est une des conséquences directes que l’on peut observer, avec Petite-Terre qui s’est affaissée de 19 centimètres. Actuellement, le risque qui pourrait avoir le plus de conséquences est celui d’un tsunami, c’est d’ailleurs pour cela que la préfecture travaille actuellement à la mise en place d’un protocole d’évacuation vers les hauteurs en cas de submersion.

Marine Gachet